samedi 8 décembre 2012

Dans les rizières avec Elles

C'est la première journée de marche. Elle a commencé à 6 heures du matin et c'est au milieu de l'après-midi qu'on accepte le sourire et l'invitation à dormir dans ce petit hôtel de Ghermu. 


On est charmés depuis le début par la couleur des rizières, les gerbes jaunes, ocres et orangées dans la lumière. Brillantes. C'est la première fois qu'on voit le riz mûr sur pied. A moins de 2000 mètres, c'est la principale culture, les collines regorgent de terrasses. On voit les parcelles qui ont été récoltées : les gerbes sont alignées au sol pour le séchage. 

Après une douche réparatrice (l'eau à peine tiède fait l'affaire à ces altitudes), on prend le temps de regarder avec nos yeux lavés de toute la fatigue physique et peut-être aussi de toutes ces images qui nous font tourner la tête. Cela ne fait que 3 jours que nous sommes au Népal. C'est ce soir, un véritable commencement de la longue marche dans les montagnes. 


On les voit alors, on les entend surtout. Elles sont assises sous un arbre, elles prennent leur repas en bordure des champs où elles travaillent depuis le matin. Elles rient, parlent haut, nous font des signes et des sourires. Le patron de l'hôtel nous informe que ce sont des voisines qui viennent récolter le riz dans les alentours. Vous croyez que je peux leur demander de photographier leur bonne humeur ? Mais oui, bien sûr ! 



Alors je m'approche. Entre temps, elles ont repris le travail. Je longe le champs et je leur mime une demande d'autorisation de les photographier. J'ai une idée derrière la tête et ça ne manque pas, elles me font signe d'approcher. Dès que je suis à leur hauteur, je leur propose de les aider. Hop, serpette en main, je reçois une première leçon pratique : il faut tenir fermement une gerbe de riz à la base dans la main gauche et avec la serpette, donner un coup sec en-dessous de la main. On étale alors les gerbes coupées sur le sol, bien alignées. Tchac, tchac, tchac, je me concentre, elles m'observent en commentant mes gestes et en riant beaucoup. Très vite, je vois que je fais l'affaire, on me garde. Je leur ai dit que j'aime travailler la terre, que j'ai eu un jardin. Je suis sûre qu'elles comprennent que je peux les aider vraiment. Alors, se met en place une façon de travailler ensemble : on coupe les plans de manière à optimiser l'avancement des travaux. Il y a celles qui redressent les gerbes, celles qui coupent, celles qui ont fini de couper et déposent la récolte... Ca s'enchaîne, ca avance bien, on discute quand il faut attendre quelques instants. 




Une cadence s'installe. Quand nos regards se croisent, nous éclatons de rire, sans doute ressentons-nous la même stupéfaction de voir que nous nous sommes calées les unes aux autres, sans chef. C'est l'usine des gens heureux. La-dessus, Hervé arrive et se fait embaucher. Je crois qu'à nous 2, on leur a allégé un peu la tâche. A 17 heures, il faut qu'elles repartent dans leur village, à deux pas. Du coup, on a le temps de rester un peu ensemble à se raconter quelques tranches de nos vies. Kumari est une femme du peuple Gurung, elle est magnifique avec sa peau sombre. 


Quand elle me serre dans ses bras et me dit que je suis sa soeur, je voudrais ne plus m'en aller d'ici.


Valérie