Les montagnes ont des sommets et aussi
une fin. On s'est laissé glisser vers Pokhara en profitant encore des pointes enneigées qui
entourent la ville.
Douceur retrouvée, mais pas seulement : on repasse sur nos traces et on remet la
main sur ce minuscule restaurant où Sanju fait une merveilleuse cuisine pour quelques
roupies. Christophe, le boulanger français est toujours là aussi. Imaginez comme on profite de ce
repos... Une semaine plus tard, on se repose encore.
Puis, la suite se dessine. Une envie de
retourner dans les montagnes affronte en duel celle d'aller faire un tour plus au sud, dans le Terrail.
Il y a un parc national, Chitwan, qui nous tente bien avec sa jungle et sa faune sauvage. C'est
finalement Chitwan qui l'emporte, malgré la crainte de degrés en trop à n'en savoir que
faire (la suite démentira cette inquiétude). On redoute aussi la renommée du parc classé Unesco qui
est donc une destination très touristique. Petite confidence : Elle aurait préféré les montagnes.
Il avait un penchant pour faire son petit photographe animalier dans le parc. Tintin reporter fut plus
fort. Cette fois encore le masculin l'emporta sur le féminin... mais elle se promet de
changer prochainement les règles de Grand-mère et de les bousculer
un peu. Il ne perd rien pour attendre. En plus, soyons bonne perdante c'était une très bonne idée !
On a fait le choix de s'installer en lisière du parc, dans la campagne alentour, à Sauraha. L'entrée du parc est chère et les excursions proposées encore davantage. Plusieurs dizaines de dollars, voire des centaines. C'est disproportionné. Allons-y donc par la bande en déclinant toutes les offres de trekking en éléphant, en jeep, en bateau, avec guide expérimenté... La bourgade est au bord de la rivière Rapti, et, comme on l'imaginait, les oiseaux ne s'arrêtent pas aux frontières du parc, c'est un vrai festival. Le rhinocéros non plus. Un soir, le voilà qui traverse la rivière et s'approche du village. Magique! On est justement en train de scruter les environs quand on le voit apparaître. Un Népalais nous prévient qu'il vaut mieux reculer un peu car, visiblement, il arrive. Il sera renvoyé dans ses quartiers un peu plus tard par les villageois.
On a profité chaque matin aux aurores de la brume qui fait dormir les touristes et fait sortir les animaux. Hordes de cerfs, sangliers sauvages, singes, marabouts, calaos, perroquets, paons, paradisiers et beaucoup d'autres oiseaux. Plus de trois cents espèces. Un régal de tous les jours, à pied ou à vélo. On découvre aussi cette partie du Népal et le peuple Tharu. Les villages sont très singuliers avec leurs maisons en bambou recouvertes de terre et décorées extérieurement. Les animaux domestiques sont partout et beaucoup vont librement : voitures à cheval, charrettes à buffles, éléphants, chèvres, canards, poules, chiens, chats...Une belle ambiance rurale, sereine, avec des surprises en continu. Les gens sont très discrets, voire distants. Peut-être est-ce leur tempérament, à moins qu'ils ne soient excédés par les visiteurs en trop grand nombre à certains endroits... On a eu du mal à établir un contact suivi avec eux, mais quand c'est possible c'est d'autant plus touchant.
Il y a une autre faune qui nous surprend. Ce sont les groupes de touristes, les Chinois en particulier. Le soir, quand les gens rentrent de safari, tout le monde se promène le long de la rivière, dans les rues du village. Les Chinois restent groupés et ne semblent pas voir les autres personnes. Ils scrutent la prochaine image à immortaliser. A la moindre occasion, ils convergent tous ensemble, appareil photo en avant, clic-clac et puis s'en vont ailleurs. Dingue! Si le sujet est un être humain, un "Tinkiou" tonitruant retentit et puis ils s'en vont comme un seul homme. Ils n'imaginent sans doute pas qu'avant d'être photographiée, une personne apprécie éventuellement une demande d'autorisation ou au moins quelques mots... On a été aussi leurs victimes !! Clic, clac, ils ont mis deux 'longs-nez' dans la boîte. On a fini par en rire tant c'est étonnant.
Les touristes indiens ont un tout autre
comportement, jovial et communicatif. Si par hasard, vous venez de
faire une douzaine de kilomètres de piste chaotique à vélo et que
vous stoppez pour faire un affût au bord d'un lac en pleine jungle,
attention, une famille indienne peut débarquer d'une jeep et arriver
vers vous joyeusement et... bruyamment. Adieu les animaux. Ils posent
plein de questions, en racontent tant et plus, nous mettent sur la
photo avec eux. Beaucoup de gentillesse et de curiosité. Puis,
comme ils sont en voyage express, ils repartent déjà mais les
animaux, eux, ne reviennent pas.
Cette semaine dans la jungle voilée,
dans les clairières et les prairies, le calme, la beauté des
villages, la force du paysage tantôt angoissant, tantôt paisible,
la présence proche de la vie sauvage nous consolent par avance de ce
qui nous attend : Katmandou puis Bangkok où le silence sera en
congé pour quelques jours.
C'était comme doit être la vie,
riche en découvertes.
Valérie